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France : Un militaire, ça démissionne ou ça ferme sa gueule...


Le scandale n’a pas fini d’enfler et il laissera des traces. Il y a une semaine, le 21 avril, une vingtaine de généraux en « deuxième section » (Les généraux en « 2ème section » ne sont plus en service actif mais restent à disposition et peuvent être rappelés si besoin est) , une centaine de hauts-gradés et plus d'un millier d'autres militaires signaient une tribune libre intitulée « Pour un retour de l’honneur de nos gouvernants ».


Ils y écrivent notamment « notre honneur aujourd’hui tient dans la dénonciation du délitement qui frappe notre patrie […] Délitement qui, à travers un certain antiracisme, s’affiche dans un seul but : créer sur notre sol un mal-être, voire une haine entre les communautés […] Délitement qui, avec l’islamisme et les hordes de banlieue, entraîne le détachement de multiples parcelles de la nation pour les transformer en territoires soumis à des dogmes contraires à notre constitution […] Délitement, car la haine prend le pas sur la fraternité lors de manifestations où le pouvoir utilise les forces de l’ordre comme agents supplétifs et boucs émissaires face à des Français en gilets jaunes exprimant leurs désespoirs… »


Et ils concluent : « Comme le disait le cardinal Mercier, primat de Belgique : « Quand la prudence est partout, le courage n’est nulle part. » Alors, Mesdames, Messieurs, assez d’atermoiements, l’heure est grave, le travail est colossal ; ne perdez pas de temps et sachez que nous sommes disposés à soutenir les politiques qui prendront en considération la sauvegarde de la nation. Par contre, si rien n’est entrepris, le laxisme continuera à se répandre inexorablement dans la société, provoquant au final une explosion et l’intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse de protection de nos valeurs civilisationnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national. »


Cet épisode est, évidemment, révélateur de la profonde crise de valeurs et de gouvernance que traverse notre pays. Mais quoique l’on pense de la gravité de la situation en France, que de très hauts gradés et d’autres militaires puissent signer un tel texte est inexplicable et inexcusable. A fortiori quand on menace d’une « intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse de protection de nos valeurs civilisationnelles », des propos qui sonnent comme une menace de coup d’Etat.


La force de l’armée républicaine est de se garder de tout engagement dans les querelles politiques : l’armée est au service de la nation et doit obéissance à ceux que cette nation a choisi de porter au pouvoir (tant que ce choix s’exerce de manière libre et démocratique, évidement). Elle se doit d’être neutre et ceux qui la dirigent ne peuvent être rien de moins qu’exemplaires : comme le dit l’adage, « le glaive cède à la toge ».


Nous avons connu, il y a 60 ans, un terrible précédent : le Putsch d’Alger (21-26 avril 1961) durant lequel une partie de l’armée a cru pouvoir s’affranchir de son devoir d’obéissance au pouvoir civil. La tentative de coup d’Etat échoua, 220 officiers furent radiés, 114 jugés et condamnés et un groupement de commandos ainsi que 3 régiments dissous. Environ un millier d’officiers démissionnèrent par la suite.


Renforcée par des militaires en rupture de ban, l’Organisation de l’Armée Secrète (OAS) allait ensuite se lancer dans un terrorisme aveugle qui, en Algérie et en métropole fit au moins 2 000 morts.

Il n’est pas exagéré de dire que l’armée a mis au moins dix à se remettre de cette triste aventure qui l’avait profondément divisée et avait durablement terni son image.


Au-delà de l’embrassement politique qui a suivi la publication du 21 avril (et au cours duquel on a pu voir Marine Le Pen encourager les signataires et leurs sympathisants à « la rejoindre », attitude qui est, à minima, totalement anti-républicaine et irresponsable) le général François Lecointre, chef d’état-major (CEMA) a trouvé les mots justes « Ces officiers généraux vont passer chacun devant un conseil supérieur militaire. Au terme de cette procédure, c'est le président de la République qui signe un décret de radiation. Je souhaite que leur mise à la retraite d'office soit décidée », demandant « des sanctions plus fortes pour les plus gradés. Je considère que plus les responsabilités sont élevées, plus l'obligation de neutralité et d'exemplarité est forte.»


En mars 1983, Jean-Pierre Chevènement déclarait : « Un ministre ça démissionne ou ça ferme sa gueule ».


Les signataires de l’appel du 21 avril auraient bien inspirés de s’appliquer cette règle.

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